PortraitQui était Hayat B, la jeune migrante abattue par la Marine royale?

En novembre prochain, elle devait fêter ses 20 ans. Hayat B, native de Tétouan, est la jeune victime de l’interception armée au large de la cité balnéaire de M’Diq en Méditerranée par la Marine royale d’un « go fast » sur lequel elle a embarqué avec une vingtaine de candidats à l’exil pour l’Europe. Touchée par des balles traçantes « au thorax et à l’abdomen », selon nos sources, elle devait succomber à ses blessures peu de temps avant son arrivée à l’hôpital de M’diq.
Une fille studieuse qui envisageait d'entrer dans la police
Selon nos informations, la jeune femme devait entamer à partir de ce septembre, sa deuxième année à la faculté de droit de Martil. Inscrite en droit en arabe, ses camarades de classe, joints par Le Desk, la décrivent comme « une fille assez active et plutôt studieuse (…) par rapport au reste de la promotion ». « Elle ne s’absentait presque jamais », nous affirme Fatima, une des étudiantes l’ayant côtoyée sur les bancs de la faculté de Martil, et auparavant au lycée Cadi El Ayad de Tétouan.
Issue d’une famille pieuse d’extraction modeste, Hayat B. a grandi à Tétouan, au sein d’une fratrie composée de deux frères et deux sœurs. Son père, qui avait enchaîné plusieurs petits boulots, s’est retrouvé au chômage. C’est à la mère qu’est revenu la lourde tâche de subvenir aux besoins de la famille. Elle travaille dans une usine de traitement de poissons. Hayat, témoin de la précarité de sa famille, a décidé de partir « pour aider sa famille », disent d’elle ses proches après avoir tenté de concilier ses études avec un travail qu'elle n'a jamais décroché, envoyant son CV, mais ne recevant jamais de réponse. Elle a eu quelques fois à travailler au pair dans des maisons contre quelques dirhams. Comme d'autres étudiants de sa promotion, Hayat avait aussi l'intention de concourir pour un poste d'agent de police, une fois ses études de droit terminées...
Hayat comptait rejoindre une tante résidente en Europe
« En Europe, elle devait rejoindre sa tante paternelle qui y travaille », nous explique toutefois une de ses amies. Elle n'a pas partagé son projet de départ avec ses camarades de la faculté et n'aurait tenu presque personne au courant de la manière qu’elle a choisie pour s’y prendre. De son avenir, elle disait juste qu’elle voulait qu’il se réalise à l’étranger, via n’importe quel moyen. « La nouvelle a surpris tout le monde ici, on entend souvent des gens partir mais pas mourir de la sorte », regrette une étudiante qui l'a connue et qui rapporte que la jeune fille était fiancée, sa main allait lui être demandée pour bientôt...
Encore sous le choc, les jeunes de son entourage qu’elle fréquentait ont encore du mal à croire à la nouvelle tragique de sa mort. « Ce sont des proches de sa famille qui nous ont prévenus tôt ce matin que la jeune femme qui a perdu la vie en allant en Espagne, c’était Hayat », raconte l’un d’eux. « C’est difficile à croire, tout le monde connaît Hayat, elle avait une vie simple même si elle était difficile à cause de la situation de ses parents. Personne ne pensait qu’elle allait avoir le courage d’immigrer (t’hreg) », ajoute notre source. La dernière fois que la jeune fille s'est connectée sur WhatsApp était tôt, vers 8h au matin du 25 septembre, jour de l'incident qui allait lui causer sa perte.
Nul ne sait encore comment Hayat a pu entrer en contact avec les passeurs espagnols, ni dans quelles conditions elle a pu embarquer avec ses compagnons d’infortune, le pneumatique ayant pris son départ à partir de Ceuta, assurent plusieurs sources concordantes.
Son corps, rendu à la famille, sera inhumé cet après-midi, selon ses proches amis. L’enterrement se fera juste après la prière d’Al-Asr à Tétouan, avance, sur Twitter, 2m.ma.
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