Le bloc notes de la rédaction

Au festival international de Clermont-Ferrand, le Maroc ne manque pas de courts
Chikhat : Entre tradition et émancipation
Avec Chikhat, Ayoub Layoussifi et Zahoua Raji plongent dans l’univers des chanteuses et danseuses traditionnelles marocaines à travers le regard de Fatine, une jeune fille de 17 ans. Alors qu’elle vient d’obtenir son baccalauréat, elle est déchirée entre deux choix : embrasser la tradition artistique familiale incarnée par sa mère, une chikha respectée, ou mener une vie plus conventionnelle aux côtés de son amoureux, qui rejette cet héritage jugé sulfureux. Ce drame de 24 minutes, co-produit entre la France et le Maroc, interroge le poids des traditions, l’émancipation féminine et le regard de la société sur les arts populaires. Azemmour, ville côtière marocaine au patrimoine riche, sert de décor à cette histoire intime et universelle. Pour Ayoub Layoussifi, réalisateur formé entre Casablanca et Paris, Chikhat s’inscrit dans une démarche engagée, mettant en lumière des réalités sociales à travers des récits captivants.
Wame : Le rêve tragique d’une troupe sénégalaise
Wame, réalisé par le cinéaste sénégalais Joseph Gaï Ramaka et produit par son fils Yanis Gaye, marque la première co-production entre le Maroc et le Sénégal. Film produit par Gorée Cinéma (Sénégal), StrangeFruit Productions (France) et co-produit la société casablancaise Free Monkeyz, cette fresque poétique et tragique suit Arma Gòo, un metteur en scène qui embarque sa troupe artistique sur un bateau en direction des mythiques studios de Cinecittà, en Italie. Rêvant de tourner une œuvre musicale, ces artistes aux multiples talents (conteurs, danseurs, acrobates et chanteurs) vont voir leur voyage basculer dans le drame. D’une durée de 29 minutes, Wame aborde avec sensibilité les aspirations artistiques africaines, la migration et la dure réalité des rêves brisés.
Dès les premières images, Ramaka installe un rythme chorégraphique, où la caméra devient un personnage à part entière, suivant les gestes des danseurs et conteurs avec une précision organique. Les plans séquences, fluides et maîtrisés, traduisent la cohésion du groupe, tandis que des cadrages plus resserrés capturent l’intensité des regards et des silences.
La lumière, chaude et enveloppante au départ, se durcit à mesure que le récit prend une tournure plus sombre, accentuant l'opposition entre l’utopie et la réalité implacable du voyage.Le travail sonore de Wame est essentiel : les percussions, les chants et les bruits ambiants participent à la construction d’un espace sensoriel où la musique et le récit se confondent. Les silences sont eux aussi porteurs de tension, marquant les ruptures du récit et l’inévitable basculement vers le drame.
Joseph Gaï Ramaka, récompensé à la Mostra de Venise et au Festival de Cannes, continue d’explorer les identités culturelles et les trajectoires humaines à travers un cinéma à la fois politique et poétique avec un regard aussi serein que préoccupé, avec sa vision artistique unique. Un film en noir et blanc d'une belle grâce aussi bien dans les gestes que dans le message où les cours parlent autant que les dialogues.
Regards vers l’Afrique
Le festival donne la part belle à l’Afrique avec en plus des autres sections, la section Regards d’Afrique, qui célèbre la diversité et l’innovation du cinéma panafricain. Deux programmes de courts métrages qui explorent les richesses du cinéma panafricain tout en mettant en avant les jeunes talents du continent sont proposés. Une occasion pour le public de Clermont-Ferrand de découvrir des visions singulières, ancrées dans l’histoire et les réalités contemporaines du continent.
©️ Copyright Pulse Media. Tous droits réservés.
Reproduction et diffusions interdites (photocopies, intranet, web, messageries, newsletters, outils de veille) sans autorisation écrite.