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D’un Moulay Hassan à l’autre, petite histoire d’un baisemain chérifien

18.01.2016 à 19 H 00 • Mis à jour le 24.07.2016 à 21 H 37 • Temps de lecture : 3 minutes
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Que le Petit Prince retire la main qu’on veut lui embrasser n’est pas une nouveauté. Que le souverain accepte qu’on remplace le baisemain coutumier par un « baise-épaule » est une révolution.

La semaine précédente, Moulay Hassan ben Mohammed ben Hassan ben Youssef a eu droit à son énième buzz. Un buzz aux dimensions internationales s’entend, ainsi qu’il sied à son noble rang.


La chose a démarré incidemment, comme souvent. Sous l’intitulé Le Prince n’aime pas les baisemains, le très britannique Daily Mail a posté une vidéo montrant notre très jeune et bien-aimé héritier du trône, dans l’exercice de ses fonctions protocolaires, s’escrimant à retirer — prestement et systématiquement — sa menotte que de hauts dignitaires et autres hauts gradés militaires du royaume s’obstinaient à vouloir embrasser, malgré l’évident embarras de l’intéressé.


La presse électronique du monde entier s’est empressée de relayer l’image — par trop craquante — d’une telle modestie princière, y relevant un signe flagrant de changement : autres temps, autres moeurs…


Seulement, voilà  ! Le vieil observateur du fait makhzénien que je suis a eu comme une réminiscence-réticence. Je savais que j’avais, jadis, vu, lu ou entendu un certain récit du même acabit.


Quelques heures poussiéreuses de consultation bibliothécaire plus tard, je tombe sur ce que je cherchais.



Cover-DEFI-DSK_5541-REC-2Voici ce qu’écrivait, en 1976, dans Le Défi (éd. Albin Michel) feu Hassan II : « Au lendemain de l’Aïd el Adha de 1936, je traversais le Méchouar devant le palais où, dans la salle du trône, j’aillais me tenir à côté du souverain au moment où il recevait les délégations venues lui offrir leurs voeux. La foule était des plus denses et un certain nombre de notables en costume traditionnel accoururent et m’embrassèrent la main. Lorsque je rejoignis mon père, il me prit à part :


— Mon fils, me dit-il, je t’ai observé tout à l’heure lorsque tu traversais la place et que tu tendais ta main à baiser. Tu ne semblais pas ressentir la moindre gène et au contraire y prendre du plaisir. À l’avenir, n’oublie jamais de retirer la main que l’on veut embrasser. Sache que l’attachement témoigné à notre famille étant d’ordre spirituel et moral, il ne saurait être exprimé par un baisemain. »


Moralité de l’Histoire ? De tout temps, la bienséance chérifienne voulait que le sujet se jette sur la main du Prince pour l’embrasser, à charge pour ce dernier de la retirer, le plus rapidement possible. 


Moulay Hassan ben Mohammed, au collège royal. Très tôt, il a été aux côtés de son père dans la direction des affaires. LIFE

Qu’est ce à dire ? Que rien n’a changé sous le ciel des Alaouites ? Ce serait pure mauvaise foi que de l’affirmer. Outre le fait qu’il n’y a pas si longtemps, le baisemain était une marque de respect courante dans la société marocaine, bien en dehors du cadre de la royauté (entre fils et père, metâallem et mâallem,..), il n’a échappé à personne que quantité de personnalités publiques (femmes députées, acteurs de la société civile, artistes, notables sahraouis, …) ont, depuis l’avènement du nouveau règne, troqué le baisemain coutumier contre un « baise-épaule » ou une profonde révérence — tout aussi respectueux d’ailleurs — et ce, avec l’accord tacite du souverain, soyons-en certains.


Dieu merci, le Maroc n’est pas un pays de rupture, encore moins de révolution. Mais, Dieu merci aussi, le Maroc est un pays en perpétuelle évolution. Une évolution certes lente mais permanente.


Gageons que dans un avenir très lointain, les futurs sujets-citoyens du futur roi Hassan III étudieront — avec curiosité et amusement — ce phénomène du baisemain, alors, évidemment tombé en totale désuétude.

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Par @jamal_boushaba
Le Desk Culture