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n°911.Sahara : le rapport de Guterres dément l’état de guerre décrit par le Polisario

15.10.2023 à 10 H 24 • Mis à jour le 15.10.2023 à 10 H 38 • Temps de lecture : 16 minutes
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Dans son nouveau rapport au Conseil de sécurité, qui vient d’être publié officiellement sur le site internet de l’ONU, Antonio Guterres a décrit la situation au Sahara comme étant marquée par des « tensions et hostilités de faible intensité », ce qui remet en cause la propagande du Polisario relayée par l’Algérie sur la supposée guerre qui sévirait dans le territoire

En application de la résolution 2654 (2022), par laquelle le Conseil de sécurité a prorogé le mandat de la Mission des Nations Unies pour l’organisation d’un référendum au Sahara occidental (MINURSO) jusqu’au 31 octobre 2023, le Secrétaire général des Nations Unies, Antonio Guterres a officiellement présenté son rapport sur la situation qui prévaut sur le territoire du Sahara occidental depuis le 3 octobre 2022. Il décrit la situation sur le terrain, l’état d’avancement des négociations politiques, l’application de la résolution 2654 et les difficultés auxquelles se heurtent les opérations de la Mission et les mesures prises pour les surmonter. Son rapport a été distribué aux parties en amont du vote de la prochaine résolution sur la Minurso programmé par le Conseil de sécurité ce 30 octobre.


Hostilités de faible intensité

La situation au Sahara occidental a continué à se caractériser par des tensions et des « hostilités de faible intensité » entre le Maroc et le Front Polisario. La situation actuelle a gravement entravé les opérations de la Minurso en particulier ses efforts en matière de logistique et de réapprovisionnement.


La plupart des tirs de part et d’autre du mur de sable signalés à la Minurso par les parties sont restés concentrés dans le nord du territoire, près de Mahbas. La Minurso n’a souvent pas été en mesure de confirmer de manière indépendante le nombre et le lieu des tirs signalés et leurs conséquences ont continué de faire l’objet d’affirmations divergentes par les parties.


Entre le 1er septembre 2022 et le 31 août 2023, les FAR ont signalé à la Minurso 550 faits impliquant des tirs contre ses unités stationnées le long du mur de sable ou à proximité, dont 69 % environ à Mahbas.


Lire aussi à ce propos notre Datadesk  : Guerre sans nom au Sahara : la réalité sur le terrain


Depuis novembre 2022, la Minurso a effectué 108 patrouilles d’enquête pour se rendre sur les lieux où s’étaient produits des faits signalés (total de 219 sites). Au cours de la période considérée, les FAR ont également signalé avoir observé de petits drones de surveillance survoler ses unités à 18 reprises.


Au cours de la même période, le Polisario a annoncé qu’il avait procédé à 758 tirs contre les FAR, dont environ 68 % concentrés à Mahbas.


À la demande des Forces armées royales (FAR) et sous son escorte, la Minurso a visité depuis novembre 2022 des lieux où des tirs se seraient produits à proximité du mur de sable et, dans plusieurs cas, a observé des traces de munitions de mortier explosées. Pour des raisons de sécurité, ces visites ont souvent eu lieu plusieurs jours après les faits présumés, ce qui ne permet pas aisément de déterminer de façon concluante ce qui s’est passé.


« Le Secrétaire général de l’ONU, Antonio Guterres, a démenti, dans son nouveau rapport au Conseil de sécurité sur le Sahara marocain, les milliers de communiqués de l’Algérie et du Polisario sur une guerre imaginaire au Sahara marocain », commente ainsi l’agence officielle MAP.


Lire aussi à ce propos notre Désintox : "Bombardements du Polisario", les preuves sur la falsification algérienne


Une piste d’atterrissage en question

En décembre, les médias ont rapporté que les FAR concentrait des véhicules et des forces près de sa base à Bir Anzarane (à environ 150 kilomètres de la base d’opérations de la Minurso à Oum Dreyga et à 75 kilomètres du mur de sable). Une patrouille terrestre de la Minurso qui s’est rendue sur place le 12 décembre n’a détecté aucun signe de concentration de troupes ou de véhicules, mais a observé une nouvelle piste d’atterrissage de 3,2 kilomètres de long. L’analyse des images satellite a confirmé que la piste d’atterrissage avait été construite après la reprise des hostilités en 2020. La Minurso a également observé sur les images satellite des bâtiments qui semblaient être des hangars pour avions, ainsi qu’un périmètre délimité par des barrières physiques comprenant des tours de garde et des murs extérieurs.


Le 22 décembre, la Minurso a envoyé une visite de liaison dans le sous-secteur concerné des FAR pour soulever la question et a été informée que la piste d’atterrissage était une installation civile construite par une entreprise civile et qu’elle ne servait aucune finalité militaire. Lors de sa première visite de liaison au commandement sud des FAR à Agadir les 18 et 19 juillet 2023, le nouveau commandant de la force de la Minurso s’est enquis de la piste d’atterrissage et de signalements plus généraux relatifs à des constructions militaires dans la région.


Dans une lettre adressée le 2 août au commandant de la force de la Minurso, le général de corps d’armée Mohammed Berrid, nouvellement nommé inspecteur général et commandant de la zone Sud des FAR, a indiqué que la construction du « nouvel aérodrome » avait commencé en avril 2021 dans le cadre des « projets de développement » lancés par le Gouvernement du Maroc.


Frappes de drones

La Minurso a continué de recevoir des informations faisant état de frappes menées par les FAR à l’aide de drones aériens à l’est du mur de sable.


Le 1er novembre 2022, la Minurso a été informée par le Front Polisario et les médias locaux qu’une attaque aérienne avait eu lieu dans une zone connue pour la présence de mineurs d’or artisanaux à Mijek, au cours de laquelle six civils auraient trouvé la mort.


Le 3 novembre, une équipe d’enquêteurs de la Minurso s’est rendue sur les lieux où elle a observé les restes calcinés de cinq personnes et un véhicule détruit. La Mission a été informée par des interlocuteurs locaux du Front Polisario qu’une sixième personne blessée par la frappe était décédée à l’hôpital de Zouerat (Mauritanie).


Selon des informations locales, quatre autres personnes ont été blessées pendant la frappe. La Minurso a également pu déterminer que deux autres frappes avaient touché une zone voisine où la Minurso a pu observer des véhicules détruits, dont l’un avait une plaque d’immatriculation mauritanienne, mais aucun décès n’a été signalé par les interlocuteurs locaux du Front Polisario.


Le 13 janvier 2023, une équipe d’enquêteurs de la Minurso s’est rendue sur le site d’une attaque aérienne qui aurait eu lieu le 12 janvier à Tifariti et au cours de laquelle un civil aurait été tué. L’équipe a pu voir la dépouille d’un individu et un véhicule détruit.


Le 29 janvier, la Minurso a reçu des informations par l’intermédiaire du Front Polisario et des médias sociaux selon lesquelles une attaque aérienne avait eu lieu le 24 janvier à Bir Lahlou, attaque qui aurait entraîné la mort de trois personnes de nationalité mauritanienne.


Le 1er février, une équipe d’enquêteurs de la Minurso s’est rendue sur les lieux où elle a constaté la présence de cadavres de trois personnes aux côtés d’un véhicule détruit. Elle a retrouvé un permis d’exploitation minière délivré par la Mauritanie. Auparavant, le 27 décembre 2022, le président de la Mauritanie, Mohamed Ould Cheikh El Ghazouani, avait exhorté les orpailleurs mauritaniens à respecter les règles visant à sauver des vies et à ne pas s’exposer au danger.


Le 1er septembre 2023, selon certaines informations, une attaque de drone lancée par les FAR à Bir Lahlou aurait fait quatre victimes, dont un commandant militaire régional du Front Polisario. Le 2 septembre, dans un communiqué, le Front Polisario a annoncé une période de deuil de trois jours en mémoire des victimes.


Dans des lettres adressées à Antonio Guterres le 14 octobre, et par la suite le 17 juillet 2023, le chef du Polisario, Brahim Ghali a accusé le Maroc d’avoir « recouru à toutes sortes d’armes, notamment des drones aériens, pour tuer brutalement non seulement des dizaines de civils sahraouis mais également des civils de pays voisins, qui transitaient » par le territoire du Sahara Occidental.


Lire aussi à ce propos notre Datadesk : Maroc-Algérie-Polisario : la danse des drones


Dans une lettre adressée au Secrétaire général de l’ONU le 30 juin 2023, le Représentant permanent du Maroc auprès de l’Organisation des Nations Unies à New York, Omar Hilale a accusé le Front Polisario de mettre en pratique son « nouveau modus operandi, notamment l’usage de véhicules banalisés, l’engagement de combattants déguisés en civils », « son objectif étant de tromper la vigilance des unités de l’Armée royale marocaine et ternir leur image en cas de pertes subies ».

 

La Minurso a recueilli 19 signalements provenant de diverses sources au sujet de frappes présumées menées par des drones de l’Armée royale à l’est du mur de sable entre le 1er septembre 2022 et le 1er février 2023, après quoi aucune frappe aérienne n’a été enregistrée par la Mission jusqu’au 31 août.


Des observateurs militaires de la Minurso ont régulièrement repéré des drones des FAR à l’aéroport de Smara. À chaque fois, la Minurso s’est mise en contact avec les parties en vue d’obtenir de plus amples renseignements.


À 14 reprises, en coordination avec les FAR et le Polisario, la Minurso a pu se rendre sur les lieux où des faits avaient été signalés. À cinq reprises, le Polisario n’a pas donné son accord. Dans douze cas, les enquêtes menées par les observateurs militaires de la Minurso avec l’aide de spécialistes de la composante Lutte antimines ont permis de confirmer de façon indépendante qu’une frappe aérienne avait eu lieu d’une façon ou d’une autre et de déterminer que les frappes avaient causé neuf victimes.


Au cours de la période considérée, les dirigeants militaires de la Minurso ont effectué deux visites au quartier général de la zone Sud des FAR à Agadir, en septembre 2022 et en juillet 2023. Au niveau opérationnel, trois réunions ont été organisées entre la composante militaire de la Minurso et l’Armée royale – une à Laayoune en novembre 2022 et deux à Agadir en décembre 2022 et janvier 2023.


La Minurso entravée par le Polisario

À l’est du mur de sable, le Front Polisario a continué de restreindre les mouvements des patrouilles terrestres de la Minurso le long de couloirs de 20 kilomètres à partir de chaque base d’opérations. Toutes les patrouilles terrestres ont été interrompues en août 2022 suite à l’introduction de mesures strictes d’économie de carburant. Le commandant de la force n’a toujours pas été en mesure d’établir un contact direct avec la direction des forces militaires du Front Polisario et toutes les communications ont continué d’être effectuées uniquement par correspondance écrite. Au niveau de toutes les bases d’opérations et à Rabouni, près de Tindouf (Algérie), les interactions en personne se sont poursuivies avec les éléments de liaison du Polisario.


Les restrictions imposées par le Front Polisario à la liberté de circulation ont continué d’empêcher la Minurso d’assurer de manière sûre et fiable des opérations de logistique, de maintenance et de ravitaillement à destination des bases d’opérations situées à l’est du mur de sable. Dans une lettre adressée à Alexander Ivanko, chef de la Minurso le 26 janvier, le Polisario a fait part de son évaluation des multiples risques associés à la guerre en cours pour la sécurité et la sûreté du personnel de la Minurso, qui fournissaient « des motifs raisonnables de penser que la conduite de convois terrestres restait très risquée et donc déconseillée dans de telles circonstances ».


Le 17 mars 2023, alors que les réserves de carburant des bases d’opérations situées à l’est du mur de sable atteignaient un niveau critique, Ivanko a écrit aux parties pour les informer de l’intention de la Mission de déployer un convoi terrestre de Smara à Mehaires le 22 mars, en dernier recours, pour réapprovisionner ses bases d’opérations et maintenir les opérations de la Minurso à l’est du mur de sable. Le même jour, les FAR ont répondu en soutien au convoi. Le 20 mars, le coordinateur du Polisario auprès de la Minurso a écrit à Ivanko pour souligner que «  toute action unilatérale menée au mépris des multiples risques liés à la guerre en cours dans le territoire constituerait une grave menace pour la sécurité et la sûreté du personnel de la Minurso ».


Le convoi est parti le 22 mars. À l’approche de Mehaires, une vingtaine d’éléments armés du Polisario ont bloqué la voie et arrêté le convoi, insistant sur le fait qu’il ne pouvait pas continuer et qu’il devait retourner à Smara. Après avoir discuté avec le chef du groupe, le convoi a passé la nuit dans le désert et est retourné à Smara le lendemain, sans livrer sa cargaison à l’équipe qui se trouvait sur le site de Mehaires.


RAPPORT SG ONU- SAHARA - 2023


À la suite d’échanges de haut niveau avec l’Envoyé spécial Staffan De Mistura, Alexandre Ivanko et des membres du Conseil de sécurité, Brahim Ghali a écrit à Antonio Guterres le 29 mars pour l’informer qu’ « en signe de bonne volonté et pour aider à surmonter certains des problèmes logistiques que rencontraient la Minurso le Front Polisario était disposé à accorder à la Mission un passage sûr, à titre exceptionnel et provisoire pour qu’elle effectue un convoi logistique terrestre afin de réapprovisionner ses bases d’opérations situées à l’est du mur de sable ».


Entre avril et juin, la Minurso a ensuite effectué cinq mouvements distincts de convois terrestres de réapprovisionnement vers ses bases d’opérations situées à l’est du mur de sable, à Agüenit, Mehaires, Mijek et Tifariti, afin de livrer du carburant et d’autres fournitures générales d’entretien ainsi que le matériel de génie dont elle avait besoin de toute urgence. Le 13 septembre, un convoi supplémentaire a pu être acheminé à la suite d’un nouvel échange diplomatique avec le Polisario.

 

« Le Secrétaire général de l’ONU a fustigé les restrictions et obstructions du Polisario à la supervision du cessez-le-feu par la Minurso, notamment, pour vérifier la véracité de la soi-disant guerre rapportée par le Polisario à la Mission onusienne et relayée par l’Algérie. L’objectif étant de dissimuler le fait que la prétendue guerre qu’ils tentent de véhiculer depuis trois ans n’est qu’une chimère et pure fabrication, dont le principal but est de vendre des mirages aux populations séquestrées dans les camps de Tindouf et de détourner l’attention sur les échecs de ce groupe armé lié au terrorisme et de l’agenda séparatiste qu’il met en œuvre, pour le compte de son parrain algérien », a commenté l’agence officielle MAP.


Guterres préoccupé par les relations Rabat-Alger

Dans ses conclusions et recommandations, Antonio Guterres déclare être « vivement préoccupé par l’évolution de la situation au Sahara occidental ». « Je suis parvenu à des conclusions analogues dans mes deux précédents rapports au Conseil de sécurité sur la situation concernant le Sahara occidental, ce qui montre bien que l’état délétère de la situation s’est enraciné. Cet état de fait doit être infléchi de toute urgence, notamment pour éviter toute nouvelle escalade. C’est pourquoi j’appelle toutes les parties concernées à s’efforcer de changer de cap sans délai, avec l’aide de l’ONU et l’appui de l’ensemble de la communauté internationale », écrit le Secrétaire général dans son rapport.


« La poursuite des hostilités et l’absence de cessez-le-feu entre le Maroc et le Front Polisario marquent un net recul dans la recherche d’une solution politique à ce différend de longue date. Les incursions quotidiennes dans la zone tampon attenante au mur de sable et les hostilités entre les parties dans ce secteur sont contraires à son statut de zone démilitarisée et menacent encore davantage la stabilité de la région, et un risque d’escalade existe tant que persistent les hostilités. Les frappes aériennes et les tirs de part et d’autre du mur de sable n’ont cessé de contribuer à la montée des tensions. Dans ce contexte, il est primordial de rétablir un cessez-le- feu », ajoute le chef de l’ONU.


« Ce contexte difficile rend la négociation d’une solution politique à la question du Sahara occidental plus urgente que jamais, près de cinq décennies après le début du conflit. Sous réserve que toutes les personnes concernées se mobilisent de bonne foi et pourvu qu’il y ait une forte volonté politique et un soutien constant de la communauté internationale », estime Guterres qui « demeure convaincu qu’il est possible de parvenir à une solution politique juste, durable et mutuellement acceptable, qui permette l’autodétermination du peuple du Sahara, conformément aux résolutions 2440 (2018), 2468 (2019), 2494 (2019), 2548 (2020), 2602 (2021) et 2654 (2022) du Conseil de sécurité ».


« Je constate avec regret que la méfiance continue de s’insinuer dans la région. Dans le territoire, les actes unilatéraux de revendication et les gestes symboliques qui persistent continuent d’être source de tensions constantes et aggravent la situation. J’encourage les parties à porter leur attention sur les intérêts qu’elles partagent et je les invite instamment à éviter une nouvelle escalade par leurs discours et leurs actes », commente Guterres.


« Dans ce contexte, je me félicite des consultations bilatérales informelles qui se sont tenues sous les auspices de mon Envoyé personnel à New York en mars 2023. Il est encourageant que le Maroc, le Front Polisario, l’Algérie, la Mauritanie et les membres du Groupe d’Amis aient accepté son invitation et que le format retenu ait été largement accepté. Il semble émerger un nouveau cadre supplémentaire sur lequel s’appuyer. Il est maintenant essentiel que toutes les parties concernées développent plus avant leurs positions afin de progresser vers une solution politique juste, durable et mutuellement acceptable, comme l’a demandé le Conseil de sécurité dans sa résolution 2654 (2022) », ajoute Guterres.


Et de conclure : « les États voisins ont toujours un rôle crucial à jouer pour parvenir à une solution à la question du Sahara occidental. Dans ce contexte, la détérioration des relations entre l’Algérie et le Maroc reste préoccupante. Je regrette que l’occasion n’ait pas encore pu être saisie d’aplanir les divergences entre les deux pays et je les encourage à renouer le dialogue pour rétablir la concorde et à renouveler les efforts visant la coopération régionale, y compris en vue d’établir un environnement propice à la paix et à la sécurité ».

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