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n°299.Sahara: six mois pour trouver un cadre de négociations directes

28.04.2018 à 00 H 44 • Mis à jour le 28.04.2018 à 01 H 00 • Temps de lecture : 9 minutes
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Dans sa résolution 2114 votée par 12 voix, 0 contre et 3 abstentions, le Conseil de sécurité proroge de 6 mois la mission de la Minurso au lieu de 12. Si dans sa globalité, le texte est favorable au Maroc et invective le Polisario, il presse cependant les deux parties à la désescalade et à s'engager sans tarder dans des négociations directes. Compte-rendu

Le Conseil de sécurité des Nations Unies a adopté la résolution n°2114 prorogeant le mandat de la Mission des Nations Unies pour l'organisation d'un référendum au Sahara occidental (MINURSO) pendant six mois, jusqu'au 31 octobre.


Douze pays membres ont voté en faveur de cette résolution, trois se sont abstenus. Il s’agit de la Russie, de la Chine et de l’Ethiopie.



Les Etats-Unis, en leur qualité de penholder ont justifié leur appui à cette résolution par la nécessité de relancer un processus enlisé depuis des années. Fait à souligner, la représentante de Washington au Conseil a rappelé les regrets de John Bolton, architecte du Plan Baker II et aujourd’hui Conseiller à la sécurité de Donald Trump qui a toujours défendu la tenu d’un referendum, option rejetée depuis 2007 par le Maroc.


La Russie qui avait bloqué une première version du draft, quant à elle, a reconnu « le travail d’intérêt qui a été entrepris pour arriver à cette résolution », mais a fustigé « un processus non transparent » qui a aboutit à un résultat « déséquilibré ». Tout en expliquant avoir choisi de ne pas opposer son véto, Moscou a regretté que le texte « abandonne les fondations d’une solution mutuellement acceptable » et qui donne lieu à des « interprétations équivoques ». Le représentant russe a regretté les « effets négatifs » de certains pays du « Groupe des amis du Sahara Occidental » qui ont participé à la rédaction du texte adopté, faisant probablement allusion à la France qui a pesé sur certains passages accablants le Polisario et donnant l’avantage au Maroc.


La Russie a souligné que le volet des droits de l’Homme n’a pas suffisamment été mis en exergue, faisant référence à l’élargissement de la mission de la Minurso à ces questions, ce que Rabat refuse. Enfin, Moscou conclut sur le fait que le concept de l’autodétermination doit être sanctuarisé, « toute autre formule n’étant pas acceptable ».

 

L’Ethiopie qui s’était rangée du côté de Moscou contre une première version très favorable au Maroc estime que « la résolution n’est pas neutre » pour justifier son abstention. Addis Abeba appelle à des négociations directes entre le Maroc et le Polisario et rappelle aussi le principe « fondamental » de l’autodétermination.


Même son de cloche de la Chine qui a rejoint le camp des abstentionnistes. Pékin a regretté l’absence de « pressions » sur les parties pour les amener à la table des négociations.


De son côté la Suède a expliqué son oui par la nécessité de sortir de l’impasse créée par les récentes tensions sur le terrain. « La routine n’est plus acceptable », a cependant affirmé le représentant suédois qui a marqué sa satisfaction de voir un mandat de la MINURSO écourté de six mois. Il a précisé que les pays voisins (donc l’Algérie) devraient davantage participer au processus de paix.


Le Royaume Uni a quant à lui orienté son argumentaire sur « la nécessité de la désescalade », a appuyé le rôle de la MINURSO et appelé de ses vœux à une solution « politique » du conflit.


Enfin, la France, soutien indéfectible du Maroc, a salué l’adoption de cette résolution, affirmant que celle-ci ouvre un « horizon » permettant une « dynamique constructive  » a affirmé l’ambassadeur de France à l’ONU, François Delattre.

 

 « Le renouvellement pour six mois seulement du mandat de la mission, qui vise à maintenir la mobilisation du Conseil en appui du processus politique, doit rester une exception », a dit Delattre suite au vote de la France. Pour le diplomate français, le maintien d’un cadre annuel « garantit en effet la stabilité des opérations de maintien de la paix ».

 

 Il a soutenu que le texte voté ce vendredi « doit nous permettre collectivement de prévenir tout risque d’escalade, de soutenir le travail irremplaçable de la MINURSO et d’encourager une dynamique constructive sur le processus politique ».

 

Delattre a réitéré le « plein soutien » de son pays au processus politique mené sous les auspices du Secrétaire général de l’ONU et à la facilitation de son Envoyé personnel, Horst Köhler, « afin de parvenir à une solution politique juste, durable et mutuellement acceptable à la question du Sahara ».

 

« Nous espérons que ce renouvellement permettra d’encourager la consolidation de cette dynamique et des efforts sérieux et crédibles permettant de faire avancer le processus, conformément aux paramètres fixés par le Conseil de sécurité », a conclu l’ambassadeur.


Avant l'adoption, le Conseil a été informé le 17 avril lors de consultations sur la situation au Sahara occidental par le Représentant spécial et chef de la MINURSO, Colin Stewart. Stewart a souligné la situation actuelle sur le terrain, notamment la présence du Front Polisario dans la zone tampon de Guerguerat et l'annonce, fin mars, que le Front Polisario relocaliserait les fonctions administratives à Bir Lahlou et à Tifariti.


Le Front Polisario a déclaré que c'est son droit légal d'opérer dans les deux endroits, puisqu'ils sont en dehors de la zone tampon. Au cours de la réunion d'information, les membres ont également examiné le dernier rapport du Secrétaire général sur le Sahara occidental (S / 2018/277).


Les membres du Conseil ont exprimé leur commun accord sur « le rôle vital que joue la MINURSO dans le suivi du cessez-le-feu et la prévention des conflits », et que l'objectif principal devrait être « la reprise des négociations politiques ».


Les États-Unis, penholder du dossier du Sahara occidental, ont d'abord distribué un projet de résolution au « Groupe des amis du Sahara occidental » le 17 avril, en amont des consultations. Le « Groupe des amis », composé de la France, de la Russie, du Royaume-Uni, des États-Unis et de l'Espagne, ancienne puissance coloniale, n'a pas pu parvenir à un consensus sur le projet lors des négociations du 18 avril. Les membres du groupe n'étaient pas d'accord sur la manière de traiter les actions récentes du Front Polisario, et les États-Unis ont décidé de distribuer le projet à tous les membres du Conseil le 20 avril.


Après une série de négociations lundi 23 avril, les États-Unis ont examiné la contribution des membres et ont présenté un projet de résolution en bleu hier soir (26 avril). Dans un changement par rapport aux résolutions antérieures sur la MINURSO, le projet prolonge le mandat de la mission de six mois au lieu d'un an. Une manière d’augmenter la pression sur les parties au conflit afin de résoudre les tensions actuelles et les amener à la table pour un cinquième cycle de négociations formelles.


À cet égard, la résolution prie également le Secrétaire général d'informer le Conseil « régulièrement et à tout moment qu'il jugera approprié pendant la période du mandat, de l'état d'avancement et des progrès de ces négociations ». Le renouvellement du mandat de la MINURSO en octobre permettra également au Conseil d'examiner la révision stratégique de la mission prévue pour la mi-2018.


Bien que les membres du Conseil semblent convenir que les actions du Polisario dénoncées par le Maroc ne constituent pas une violation de l'accord, la plupart des membres croient que ce n'est pas « dans l'esprit » de l'accord et que cela pourrait avoir des répercussions négatives sur les négociations.


Dans sa résolution, le Conseil se déclare préoccupé par la présence du Front Polisario dans la zone tampon de Guerguerat et appelle à son « retrait immédiat », ainsi qu'à l'annonce par le Front Polisario de la délocalisation prévue des fonctions administratives. Il appelle le Front Polisario de « s'abstenir de toute action déstabilisatrice ». Au cours des négociations sur la résolution, les membres du Conseil ont exprimé différents points de vue sur la manière de faire référence à ces développements et la Russie et l'Ethiopie ont exprimé des inquiétudes concernant « l'aliénation du Front Polisario » avant de possibles négociations formelles. Malgré ces points de vue divergence, les points défavorables au Front Polisario demeurent tels qu'ils ont été présentés pour la première fois par Washington.


Dans son rapport, le Secrétaire général a décrit les limitations imposées par le Maroc aux activités de la mission, empêchant la pleine exécution du mandat du Conseil, par exemple en engageant un large éventail d'interlocuteurs aux fins de la présentation de rapports politiques. Tout en soulignant l'importance de l'exercice de toute la gamme des fonctions classiques de maintien de la paix et en demandant le soutien du Conseil à cet égard, aucun texte allant dans ce sens n’a été retenu dans la résolution finale.


Au cours de l'année écoulée, les tensions sont restées fortes entre les parties, les deux accusant systématiquement l'autre de violations du cessez-le-feu et de l'accord militaire n ° 1. Dans la résolution 2351 du 28 avril 2017, prorogeant le mandat de la MINURSO pour un an, le Conseil a reconnu que les questions fondamentales relatives au cessez-le-feu et aux accords connexes demeuraient et a invité le Secrétaire général à "explorer les moyens de résoudre ces questions". .


Cela s'est avéré particulièrement litigieux, car le Maroc a souligné l'attitude belliciste du Front Polisario pour ses actions de 2017 lorsque le celui-ci est entré dans la zone tampon à Guerguerat et n'est parti que sous la pression du Conseil le jour de l'adoption de la résolution 2351. Le Département des opérations de maintien de la paix (DPKO) a alors suggéré d'envoyer une mission technique dans la région, ce que le Front Polisario a soutenu mais pas le Maroc. Dans le projet de résolution de cette année, le Conseil a reconnu que des questions restaient en suspens, mais a invité le Secrétaire général à "interroger les parties afin de mieux comprendre ces questions".


Pour la première fois dans une résolution sur la MINURSO, le Conseil a demandé au Secrétaire général de « chercher à accroître le nombre de femmes à la MINURSO, ainsi qu'à assurer une participation significative des femmes à tous les aspects des opérations ».


La résolution demande en outre au Secrétaire général de présenter un rapport sur la situation au Sahara occidental « bien avant la fin du mandat ». Les membres du Conseil s'attendront probablement à une réunion d'information et à un rapport après la fin de l'examen stratégique de la MINURSO plus tard dans l'année.

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