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Grand angle

Ukraine : La guerre intime

28.03.2017 à 00 H 59 • Mis à jour le 28.03.2017 à 00 H 59 • Temps de lecture : 27 minutes
Par
Enquête
En trois ans, la guerre en Ukraine a fait près de 10 000 morts et plus de 20 000 blessés. Mais un chiffre noir demeure : celui des victimes de violences sexuelles commises par les forces pro-russes et pro-ukrainiennes. Dans le silence d'un conflit qui ne dit pas son nom, les humiliations, viols et autres mutilations génitales se sont lentement installées au coeur des centres de détentions clandestins et des bases militaires de fortune.

Quand Léna* se réveille, elle ne voit rien. Un bandeau lui cache les yeux et ses mains sont liées derrière son dos. La jeune femme de 22 ans ignore où elle se trouve mais perçoit au loin, des bruits et des cris. Léna sent qu'elle est « peut-être dans une cave ». Elle a soif aussi. La panique la gagne. Tellement qu'elle se met à hurler. Un garde entre brusquement et la frappe avec un fusil « jusqu'à ce qu'elle arrête », puis s'en va. Le lendemain, toujours privée d'eau et de nourriture, la jeune journaliste hurle encore. Son garde la frappe encore. De temps en temps, il la saisit pour lui faire une injection. Elle transpire alors à grosses gouttes et « perd la notion du temps ». Quand elle n’est pas harcelée, Léna réfléchit, refait l'histoire. Elle se dit qu'elle aurait dû écouter ses amis.


Ces derniers l’avaient pourtant avertie. Donetsk, situé en zone séparatiste pro-russe, est devenu un endroit dangereux pour une journaliste, surtout venant de Kiev. « Si personne ne va là-bas, le monde ne saura pas ce qu'il s'y passe », leur avait-elle répondu. C'était en mai 2014. Depuis, il ne se passe pas un jour sans qu’elle ne regrette sa décision.


Donetsk, ville emblématique de la rébellion pro-russe, et Krasnohorivka se trouvant sur le territoire contrôlé par les forces de Kiev sont des villes où les humiliations, viols et autres mutilations génitales se multiplient.


Nous rencontrons Léna pour la première fois lors d’une conversation vidéo sur Skype. La jeune femme, yeux assortis à ses cheveux châtain clair, a quitté l'Ukraine et trouvé refuge en Allemagne. Lorsque la discussion débute et que l'ancienne prisonnière apparaît devant un simple mur blanc, nous ignorons tout de l'histoire qu’elle va nous livrer. C’est son avocate, qui défend d’autres ex-détenues, qui nous a donné son numéro. Sa détention, Léna ne l’a jamais raconté en détail – ni aux activistes des droits de l'Homme, ni aux médecins qui jugeaient son cas déjà « suffisamment compliqué ». Mais ce 24 octobre 2016, protégée derrière son écran d’ordinateur, nerveuse, la jeune femme a décidé de parler.


Après quelques jours passés ligotée dans la cave, elle subit son premier « interrogatoire ». Quand ceux qui la questionnent découvrent dans son appareil photo des images de la révolution de Maïdan – ce mouvement de contestation né à Kiev, qui a abouti à la fuite du président Ianoukovitch début 2014 – le huit-clos se tend encore. Les gardes se muent progressivement en tortionnaires et la frappent... sur la tête et sur le ventre, pas seulement avec leurs poings, mais aussi avec son appareil. Le message est clair : voilà le prix à payer pour avoir photographié. Et comme cela ne suffit pas à faire parler Léna - qui n'a pas grand chose à avouer -, ils font venir un autre détenu : « Si tu ne réponds pas, c’est lui qui prend ! ». Les coups pleuvent, chaque fois deux ou trois heures durant.

 

Le procès exemplaire ?

Le dossier dAnna n'est pas le seul à se trouver entre les mains des juges ukrainiens.


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