Le bloc notes de la rédaction

Cannes 2025 : cœur couvert à la Semaine de la critique avec « L’Intérêt d’Adam »
La 64e édition de la Semaine de la Critique a débuté le 14 mai à l'Espace Miramar, marquant le coup d'envoi de cette section parallèle du Festival de Cannes dédiée à la découverte de nouveaux talents. Le film d'ouverture, L'Intérêt d'Adam, réalisé par la cinéaste belge Laura Wandel, a été présenté en première mondiale, offrant une plongée intense dans l'univers hospitalier.
La cérémonie d'ouverture a rassemblé un public nombreux, composé de professionnels du cinéma, de journalistes et de cinéphiles, venus découvrir les premières œuvres sélectionnées cette année. La déléguée générale de la Semaine de la Critique, Ava Cahen, a souligné dans son discours l'importance de mettre en lumière des récits engagés et des voix émergentes du cinéma mondial. Un discours à la fois lucide et combatif, qui a rappelé la précarité croissante des festivals et les conditions fragiles dans lesquelles œuvrent techniciens, artistes et petites structures, rappelé par le collectif « Sous les écrans, la dèche ». Une manière de réaffirmer, sans fard, la vocation première de la Semaine : défendre un cinéma libre, audacieux, et recentré sur l’essentiel les œuvres, les regards, et celles et ceux qui les portent.
« L'Intérêt d'Adam » : un drame hospitalier poignant
Dans L’Intérêt d’Adam, il n’y a ni grande musique ni lumière facile. Pas de phrases définitives ni de grandiloquence. Tout se joue dans la tension sourde des gestes, dans le regard qui dévie, dans la porte qui se ferme trop vite ou pas assez. Laura Wandel, déjà remarquée pour Un monde, n’a pas cédé à la tentation du film de festival.. Elle signe ici un huis clos éthique d’une redoutable acuité, taillé au scalpel de l’humain.
Adam a quatre ans. Il ne parle presque pas. Il est hospitalisé pour malnutrition. Sa mère est autorisée à rester à ses côtés trop longtemps, selon les règles. Lucy (Léa Drucker), infirmière en chef, laisse faire. Un écart, d’abord. Un acte de compassion, sans conséquences. Puis le quotidien se fissure. La mère refuse de partir. Le service se tend. Le droit, la loi, les responsabilités s’invitent à l’heure du goûter.
Mais la réalisatrice au supplément d'être n’assène jamais. Elle observe. À hauteur d’enfant, encore. La caméra, collée aux corps, tisse une cartographie du soin : mains gantées, portes verrouillées, respirations en apnée. L’hôpital devient une scène de conflit moral autant qu’un théâtre d’usure affective. Il n’est jamais filmé comme un symbole, mais comme un organisme vivant opaque, parfois hostile, toujours traversé par le doute.
Anamaria Vartolomei, en mère mutique et vacillante, livre une performance d’une densité rare. Léa Drucker, elle, trouve ici un rôle à la mesure de sa finesse : tout en retenue, presque cassée par l’empathie. Ce trouble éthique et sensoriel doit aussi beaucoup au travail d’orfèvre de Nicolas Rumpl, monteur fidèle de la réalisatrice, qui cisèle le récit comme une suite de respirations contrariées, entre ellipses glaçantes et silences en suspens. Le montage épouse le moindre battement d’angoisse, sans jamais en souligner le pathos, une tension chirurgicale, à la seconde près.
Le film tient sur ce fil : l’intérêt d’Adam, justement. Son bien. Son droit à être aimé, à être protégé, sans que personne ne puisse vraiment trancher à sa place. Laura Wandel signe une œuvre puissante, dénuée d’effets, mais pas de résonance. Un film qui ne crie pas, mais reste en tête, comme une question que personne ne veut poser à voix haute : que ferait-on, nous, à leur place ?
Une couverture qui fait du bien
Avec L'Intérêt d'Adam, la Semaine de la Critique démarre sur une note forte, mettant en avant un cinéma engagé et sensible aux réalités sociales contemporaines. Ce choix d'ouverture reflète la volonté de la sélection de promouvoir des œuvres qui interrogent et émeuvent, tout en offrant une plateforme aux talents émergents du cinéma international. La Semaine de la Critique se poursuit jusqu'au 22 mai, avec une programmation riche en découvertes et en émotions.
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