Le bloc notes de la rédaction

Cannes 2025 : les films de la région attendus
Cette année encore, la Croisette tend l’oreille à d’autres géographies. Dans un contexte géopolitique tendu, où les récits du monde arabe et du continent africain peinent encore à occuper une place centrale sur les écrans internationaux, la sélection 2025 du Festival de Cannes offre un prisme singulier. Ces productions s’invitent dans les différentes sections du festival, avec une vitalité narrative qui tranche avec les carcans de l’industrie. Certaines sont attendues pour leur regard politique, d’autres pour leur audace formelle, toutes contribuent à un souffle nouveau qui bouscule le récit dominant.
Eagles of the Republic – Tarik Saleh (Égypte/Suède)
Le réalisateur de Boy from Heaven, prix du scénario à Cannes en 2022, revient avec un thriller politique en compétition officielle. Eagles of the Republic s’inscrit dans la continuité de sa trilogie du Caire, cette fois en explorant les dérives de la propagande étatique à travers le parcours d’un acteur embarqué malgré lui dans une machinerie infernale. Tourné en arabe, le film est porté par Fares Fares et Lyna Khoudri.
Sirât – Óliver Laxe (Maroc/France/Espagne)
Même si le film est signé par le réalisateur espagnol Óliver Laxe, Sirâtest est profondément marocain par son ancrage, son équipe et ses paysages. Ce road-movie mystique en compétition officielle suit un père et son fils à travers les dunes du Sud marocain, à la recherche d’une jeune fille disparue. Entre quête spirituelle et geste politique discret, Laxe explore le silence et l’épure.
My Father’s Shadow – Akinola Davies Jr. (Nigeria/Royaume-Uni)
Sélectionné à Un Certain Regard, ce premier long-métrage nigérian se penche sur les tensions post-électorales de 1993, à travers le regard d’un fils tiraillé entre l’héritage politique de son père et son désir d’émancipation. Porté par Ṣọpẹ́ Dìrísù, le film affirme l’émergence d’un cinéma nigérian d’auteur, loin des clichés de Nollywood.
Aisha Can’t Fly Away – Morad Mostafa (Égypte/Tunisie/Qatar)
Morad Mostafa, remarqué pour ses courts métrages (Henet Ward, I Promise You Paradise), entre à Cannes avec un premier long délicat et frontal sur la condition des migrantes en Égypte. Présenté à Un Certain Regard, le film met en scène une jeune femme face à l’arbitraire d’un système migratoire impitoyable. Un regard humaniste sur l’invisibilisation.
Promised Sky – Erige Sehiri (Tunisie)
Après Sous les figues, la cinéaste tunisienne revient avec un récit ample, tourné entre la Tunisie et l’Italie. À la lisière du documentaire et de la fiction, Promised Sky évoque l’exil, le déracinement et la force du lien familial. Également sélectionné à Un Certain Regard, le film confirme la sensibilité d’une réalisatrice attentive aux gestes du quotidien.
Once Upon a Time in Gaza – Tarzan & Arab Nasser (Palestine)
Les frères Nasser poursuivent leur œuvre de résistance poétique avec ce drame situé dans la bande de Gaza, où le réalisme brut se mêle à une esthétique presque onirique. Projeté à Un Certain Regard, le film arrive dans un contexte où la voix palestinienne est plus nécessaire que jamais sur les écrans mondiaux.
The President’s Cake – Hassan Hadi (Irak)
Présenté à la Quinzaine des Cinéastes, ce premier long-métrage irakien est l’une des belles surprises de la sélection. Dans une atmosphère absurde et tendre, Hassan Hadi signe une satire politique centrée sur un gâteau présidentiel qui ne trouve jamais son destinataire. Derrière l’humour se cache une critique mordante de l’autoritarisme et de l’absurde bureaucratique. Un film à la fois burlesque et lucide.
L’mina – Randa Maroufi (Maroc)
Avec L’mina, présenté à la Semaine de la Critique section courts métrages, la réalisatrice marocaine Randa Maroufi s’empare d’un fait social majeur : la révolte des habitants de Jerada après des morts survenues dans une mine clandestine. Ce court-métrage hypnotique mêle reconstitutions, archives, images 3D et super 8 pour recomposer une mémoire vivante, collective et combattante. Dans un geste politique et plastique à la fois, Maroufi refuse le pittoresque ou l’esthétisation, préférant une forme mouvante et chorale qui épouse la colère et les espoirs d’une jeunesse minée par l’injustice.
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