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n°1008.ZLECAF : quelle implémentation pour booster les échanges intra-africains ?

06.11.2024 à 01 H 33 • Mis à jour le 06.11.2024 à 01 H 33 • Temps de lecture : 6 minutes
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Connectivité, logistique, harmonisation des systèmes tarifaires et de paiement … Alors que les pays africains œuvrent à accélérer l’implémentation de la Zone libre-échange continentale africaine, plusieurs défis sont à relevr. Décryptage

Un marché de 1,2 milliard de consommateurs et un PIB combiné de 3 000 milliards de dollars (MM $). Tel est le potentiel à saisir en Afrique. Cependant, ce potentiel demeure inexploité, comme l’a souligné Omar Hejira, secrétaire d’État chargé du commerce extérieur. « Depuis son retour à l’Union africaine en 2017, le Maroc n’a cessé de proposer et de mettre en œuvre les initiatives structurantes pour le continent (…) à travers ces initiatives, le Maroc travaille sans relâche pour exploiter le potentiel inexploité du commerce intra-africain, qui pour le moment reste limité à 15 % de l’ensemble des échanges, comparativement à environ 60 % dans d’autres zones », a indiqué le responsable.


C’est d’ailleurs à partir de ce constat qu’est née l’idée de la Zone de libre-échange continentale africaine (ZLECAF), un projet qui vise à créer sur le continent africain l’une des plus grandes zones de libre échange au monde.  « En ouvrant l'accès à un marché plus large, la ZLECAF encourage les pays à diversifier leurs exportations et à monter dans la chaîne de valeur vers des activités manufacturières et industrielles. Ce changement peut réduire la dépendance du continent vis-à-vis de l'exportation de matières premières, en favorisant les industries locales, créant des emplois et ajoutant de la valeur aux économies africaines », a étayé à son tour le secrétaire général de la ZLECAF, Mene Wamkele Keabetswe, à l’ouverture du premier Business Forum de la ZLECAF organisé ce 5 novembre à Casablanca.


L’accord établissant la ZLECAF, signé en mars 2018 au sommet de Kigali, s’inscrivait dans l’agenda de l’Union africaine (UA) qui vise la mise en place d’un marché unique à l’échelle du continent. En effet, l’UA estime que la suppression des barrières tarifaires stimulera la croissance commerciale d’au moins 53 %, tandis que l’élimination des barrières non tarifaires pourrait multiplier par deux le commerce intra-africain, permettant au PIB du continent de 450 MM $ à l’horizon 2035.


Si 48 États africains ont depuis adhéré à cette initiative, l’opérationnalisation de ce projet panafricain, est loin d’être achevée. Selon les données partagées par Keabetswe, depuis le lancement officiel de l’initiative en 2021, ce sont uniquement 7 pays qui ont activement participé au commerce dans le cadre de la ZLECAF, tandis qu’aujourd’hui, « 39 pays se sont préparés à mener des échanges selon les conditions préférentielles de l’accord  ». Face à la succession des chocs économiques mondiaux et l’émergence de nouveaux défis, l’accélération de la mise en œuvre de ce cadre visant à renforcer la souveraineté du continent et la résilience de ses économies devient primordiale, l’intégration régionale étant, selon Hejira, « un levier fondamental pour stimuler la croissance économique et l’emploi en Afrique  ».


La logistique et la durabilité, deux prérequis de l’intégration régionale

« Notre continent est riche en potentiel. Toutefois, pour exploiter ce potentiel il est impératif que nous franchissions un cap en matière d’investissement », souligne Hassan Sentissi El Idrissi, président de l’Association marocaine des exportateurs (ASMEX). Si la ZLECAF offre un cadre favorable pour booster l’investissement sur le continent, la mise en œuvre réelle de celle-ci, reste, d’après lui, tributaire de la réalisation de « deux conditions fondamentales » : la logistique et la durabilité. « L’optimisation rapide de nos chaînes logistiques et le respect rigoureux des principes de développement durable sont des impératifs », affirme Sentissi El Idrissi.


La réussite de la vision commune que représente la ZLECAF, étaye-t-il ne peut se concrétiser sans une « logistique performante » permettant de fluidifier les échanges, d’accélérer les opérations d’import-export et de réduire les coûts pour les opérateurs continentaux. Cela, estime le président de l’ASMEX, passe en premier lieu par le développement des infrastructures. L’importance qu’accorde le Maroc aux projets structurants de connectivité continentale, reflètent d’ailleurs l’importance de ce volet, ajoute de son côté Hejira. Selon le secrétaire d’État, « d’importants projets ont été lancés dans ce sens, dont notamment l’initiative atlantique lancée par le roi, qui couvre 23 pays africains de la façade atlantique représentant 46 % de la population africaine et 55 % de son PIB, visant à intégrer davantage les pays sahéliens au réseau atlantique et accélérer leur développement, mais aussi le projet stratégique du gazoduc Nigeria-Maroc. Ce projet emblématique symbolise notre volonté commune de renforcer l’intégration et renforcer une souveraineté énergétique pour notre continent  ».


L’aspect durabilité, en plus d’être un impératif pour faire face aux défis climatiques, fait gagner l’économie africaine en compétitivité en l’alignant aux standards mondiaux en matière de décarbonation, ajoute le président de l’ASMEX, poursuivant que « le développement durable garantit une croissance économique qui préserve l’environnement et bénéficie aux générations futures ». Pour le secrétaire général de la ZLECAF, le Maroc s’érige comme modèle dans le domaine : « Un exemple notable est l'émergence du Maroc en tant que leader de l'énergie renouvelable en Afrique et au-delà. En intégrant des pratiques durables dans des secteurs majeurs comme l'agriculture et la fabrication, le leadership du Maroc est souligné par son classement en tant que marché le plus attractif au monde pour les investissements dans l'énergie renouvelable en 2022. Le développement d'un écosystème d'énergie verte au Maroc ne se contente pas de favoriser la diversification économique et de créer des emplois pour les femmes, les jeunes et les populations rurales, il s'aligne également avec les objectifs de la ZLECAF ».


Mettre en place les « bons  » systèmes

En plus de ces prérequis, le travail mené dans le cadre de la ZLECAF vise à mettre en place un système favorable à l’intégration régionale, notamment en levant les obstacles auxquels sont confrontés les opérateurs africains. L’opérationnalisation de ce projet continental « doit être soutenue par les bons systèmes, les bonnes infrastructures et le bons cadres de fonctionnement », note cet interlocuteur. Ce travail pour adresser les freins au développement des échanges intra-africains est lancé en taclant trois principaux obstacles, fait savoir Keabetswe.


Le premier obstacle, détaille-t-il, est la non-conformité des régimes tarifaires et douaniers d’un pays à l’autre : « Notre continent avait des régimes tarifaires divergents, fragmentés et disparates en fonction des régions ou des pays, ce qui représentait un obstacle majeur pour nos exportateurs qui cherchaient à accéder aux marchés à travers le continent ». Pour remédier à cela, le Livre électronique de la ZLECAF a été mis en place, permettant « d'identifier avec précision le tarif qui s'appliquera à tel ou tel produit qu'il exporte, en fonction du pays ou de la région ».


Le deuxième frein sont les paiements transfrontaliers. « Sur notre continent, nous avons 42 monnaies », note le responsable, soulignant que cela engendre un coût annuel de 5 MM $ pour les opérateurs économiques, qui sont amenés à acheter de la devise pour pouvoir mener leurs activités commerciales dans d’autres pays du continent.  «  Cela représente un obstacle majeur, en particulier pour les petites entreprises. C’est pourquoi nous avons développé le Système de paiement et de règlement panafricain, une innovation numérique qui permet des paiements en monnaie locale et que nous jugeons résoudra ce problème et contribuera de manière significative à stimuler les échanges intra-africains  », soutient-il.


Enfin, l’accès au financement constitue un obstacle majeur entravant le développement des investissements en Afrique. Pour répondre au besoin en financement, la ZLECAF a créé un Fonds d’ajustement pour soutenir les acteurs économiques par le biais de financements, d’assistance technique, de subventions et de fonds de compensation dans leur transition vers le nouveau régime commercial. « Il est nécessaire de mettre en place des mécanismes de soutien pour que les États et le secteur privé puissent tirer activement parti du marché offert par la ZLECAF et garantir leur préparation à l'exportation », indique cet interlocuteur, notant que 1,2 MM $ ont été mobilisés à ce jour.

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