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TerrorismeL’attentat de Barcelone revendiqué par l’Etat islamique fait au moins 13 morts

17.08.2017 à 21 H 44 • Mis à jour le 17.08.2017 à 23 H 21 • Temps de lecture : 11 minutes
Par et
Une fourgonnette a percuté la foule, à Barcelone, ce jeudi 17 août, sur plusieurs centaines de mètres. Au moins treize morts et quatre-vingt blessés sont à déplorer, selon le gouvernement catalan. L'attentat a été revendiqué par le groupe État islamique. Selon des sources espagnoles. Le principal suspect, Driss Oukabir est né au Maroc en janvier 1989 à Aghbala et il était résident légal en Espagne

L’attentat s'est produit en fin d'après-midi, ce jeudi 17 août, sur la principale avenue de Barcelone, les Ramblas. « Collision massive sur les Ramblas de Barcelone menée par une personne à bord d'une camionnette, plusieurs blessés », a indiqué le service de communication des Mossos d'Esquadra, la police catalane, qui a bloqué la zone avec un cordon de sécurité. L'attentat a été revendiqué dans la soirée par le groupe Etat Islamique. Un peu plus tôt au cours d'une conférence de presse, le président de la Généralité de Catalogne Carles Puigdemont a précisé le bilan : 13 morts, 80 personnes blessées dont 15 dans un état grave. Une minute de silence sera respectée ce vendredi à midi dans la capitale catalane.


Ce que l'on savait ce jeudi en fin de soirée :

Une fourgonnette a foncé sur la foule jeudi en fin d'après-midi sur les Ramblas, grande artère piétonne du centre de Barcelone. L'attentat a fait au moins treize morts et quatre-vingt blessés, selon les éléments fournis en début de soirée par les autorités catalanes au cours d'une conférence de presse. La police a déclenché la procédure observée en cas d'attentat terroriste.




Les services d'urgence ont très vite recommandé d'éviter les alentours de la place de Catalogne, une des principales places de la ville située en haut de la célèbre avenue des Ramblas, et ont demandé la fermeture des stations de métro et de train dans le secteur.


Selon le quotidien El Pais, le conducteur du véhicule s'est enfui à pied, après avoir fauché des dizaines de personnes. La police indique qu’il s’agirait d’un homme de 1,70 m vêtu d’une chemise blanche rayée de bleu. En début de soirée, la police régionale faisait savoir que deux personnes avaient été arrêtées pour leur implication supposée dans l'attentat. Elle assurait également avoir retrouvé une seconde fourgonnette liée à l'attaque dans la localité de Vic, une commune située à 70 km au nord de Barcelone.



Un témoin a déclaré à la chaîne de télévision Sky News : « Tout à coup, cela a été le chaos. Les gens ont commencé à courir en criant, il y avait des détonations fortes. Les gens ont commencé à courir vers les magasins, il y a eu un genre de mini-bousculade là où nous étions (...). » Il a raconté avoir trouvé refuge avec plusieurs dizaines de personnes dans une église voisine.


Une personne évacuée aux urgences après l'attaque. Quique Garcia/EPA


Le Télégramme de Brest rapporte de son côté le témoignage d’un Français en vacances à Barcelone qui se trouvait sur les Ramblas au moment où le fourgon a foncé sur la foule. Sébastien Galardon, 43 ans, se baladait avec sa femme et ses deux enfants. « On était au milieu de l'avenue quand on a entendu des cris. J'ai vu le véhicule arriver à toute vitesse. Il était à 50 mètres. Il faisait des zigzags. Pour moi, c'était évident. Il s'agissait d'un attentat. » Le Français a immédiatement traversé Les Ramblas pour mettre sa famille en sécurité. « La foule était très dense. On est entrés dans la boutique du Real Madrid. On y est depuis 1 h 45. Les grilles sont fermées. On est une cinquantaine à l'étage », explique Sébastien. Il a eu le temps de voir le fourgon finir sa course « contre un kiosque » et tente de s'informer par tous les moyens possibles. Réseaux sociaux, médias locaux… « On nous parle d'un suspect recherché, mais on n'est sûr de rien », raconte-t-il. Il y a bien une petite fenêtre au fond du magasin. « Mais on essaie de ne pas trop s'en approcher. Il y a un corps juste devant. Il y a des sirènes dans tous les sens », précise Sébastien Galardon.


Les services espagnols ont mis en place une ligne téléphonique pour tous ceux qui chercheraient des nouvelles de leurs proches sur les lieux de l'incident : (0034) 932 14 21 24. Facebook a mis en place, comme il le fait désormais à chaque attentat, une procédure pour que les Barcelonais puissent indiquer à leurs réseaux s'ils sont sains et saufs.


Un officier de police assistant un blessé. David Armengou/EPA


Peu de temps après l'attaque, la maire de Barcelone, Ada Colau, a réagi par un tweet, indiquant qu'un plan d'urgence pour aider les victimes était activé. Mais les autorités espagnoles ne confirmaient pas la version de l'attentat. « En contact avec toutes les administrations. Priorité : assister les blessés sur les Ramblas et faciliter le travail des forces de sécurité », a simplement déclaré le premier ministre Mariano Rajoy sur Twitter. D'après la presse espagnole, le chef de l'exécutif a téléphoné aux représentants des principaux partis politiques – le secrétaire général du PSOE, Pedro Sánchez, celui de Podemos, Pablo Iglesias et le président de Ciudadanos, Albert Rivera – pour les informer de ce qui s'était passé, et a décidé de se rendre dans la capitale catalane.


Plusieurs dirigeants européens ont déploré l'attaque. « Nos pensées sont avec les victimes et tous ceux qui sont affectés par cette attaque lâche visant des innocents », a déclaré le président du conseil européen Donald Tusk. À Washington, le secrétaire d'État Rex Tillerson a indiqué : « Les terroristes autour du monde devraient savoir que les États-Unis et nos alliés sont résolus à vous retrouver et vous conduire devant la justice. »



Dans la soirée, le groupe Etat islamique a revendiqué l'attentat de Barcelone via l'agence de propagande Amaq, rapporte le site d'observation spécialisé dans le terrorisme SITE. « Les exécutants de l'attaque sont des soldats de l'EI », indique le communiqué.


Un modus operandi déjà observé ailleurs

D’après le quotidien de Barcelone elPeriodico, la CIA aurait averti il y a deux mois la police catalane d’une possibilité d’attaque terroriste dans la ville. L'agence américaine mettait en évidence la vulnérabilité de la Catalogne en raison du manque de formation et d'armement de sa police, et du fait que Barcelone est une destination touristique internationale de premier plan.


Des survivants de l'attaque appelant leurs proches. Pau Barrena/AFP/Getty Images


L'attentat récent le plus meurtrier en Espagne remonte à mars 2004. Des bombes placées par des islamistes dans des trains de banlieue à Madrid avaient fait 191 morts et plus de 1 800 blessés. Mais c'est la première fois que le pays est touché par une attaque au véhicule bélier, un modus operandi qui a déjà endeuillé Nice, Berlin, Londres et Stockholm depuis l'année dernière.


Le suspect Driss Oukabir qui aurait loué le van. Spanish national police/EPA


Le scénario de l’attentat de Londres en juin dernier offre notamment de troublantes similitudes avec la tuerie de Barcelone. À la sortie du London Bridge, sur la rive sud de la Tamise, une camionnette blanche circulant à une vitesse élevée a foncé sur des piétons en zigzaguant. Les assaillants s’étaient ensuite rendus au marché couvert de Borough Market, qui héberge de nombreux restaurants et pubs très fréquentés, où ils  abandonnaient leur véhicule, y poignardaient au moins deux clients avant d’être abattus par la police. L’attentat devait faire 7 morts et 48 blessés.


Fin mars 2017, un terroriste commettait un attentat à la voiture bélier et à l'arme blanchesur le pont de Westminster et à proximité du Parlement britannique et faisait cinq morts, toujours à Londres.


Des blessés recevant les premiers soins d'urgence. Spanish national police/EPA


Le 19 décembre 2016, un poids lourd lancé sur un marché de Noël à Berlin tuait 12 personnes et blessait une cinquantaine d’autres. Un attentat lui-même décalque du massacre du 14-Juillet au cours duquel, au volant d’un camion de 19 tonnes, le terroriste Mohamed Lahouaiej Bouhlel fauchait la vie de 86 personnes et faisait plusieurs centaines de blessés à Nice.


Chacun de ses attentats sera revendiqué par l’État islamique. Pour autant ce mode opératoire n’est pas le sordide apanage de l’organisation terroriste syro-irakienne. Comme Mediapart l’avait raconté, l’attaque au véhicule-bélier avait été théorisé dès 2010 par Inspire, le magazine de propagande sur internet d’Al-Qaïda dans la péninsule arabique.


Des policiers et des urgentistes portant secours à des blessés. Nicolas Carvalho Ochoa


Inspire préconisait l’utilisation d’un 4×4 comme voiture bélier, conseillait aux apprentis djihadistes de prendre leur temps et de choisir avec minutie un endroit densément peuplé. « Pour réussir le plus grand carnage, vous devez faire prendre un maximum de vitesse à votre véhicule afin d’augmenter votre force d’inertie et être capable de frapper autant de gens que possible. » Le rédacteur en chef du magazine insistait : « Gardez à l’esprit qu’à partir du moment où les gens comprendront ce que vous êtes en train de faire, ils vont se disperser, […] ils chercheront des endroits où votre véhicule ne pourra pas les atteindre. Aussi, il est important d’étudier votre chemin auparavant. L’emplacement idéal est un endroit où il y a un maximum de piétons et le moins possible de véhicules. En fait, si vous pouvez frapper dans une zone piétonne comme il en existe dans certains centres-ville, cela sera merveilleux. Certains endroits sont fermés à la circulation temporairement en raison d’un afflux de personnes. »


Tant et si bien que, même si l’État islamique revendiquera l’attentat de Nice, Al-Qaïda dans la péninsule Arabique se fendra, trois jours après le massacre, d’un communiqué de quatre pages d’« analyse de l’opération » qui est une façon de s’attribuer la paternité, si ce n’est de l’action, au moins de l’idée. L’organisation terroriste se félicite de la pertinence du choix de l’arme par destination – le camion – « à une époque où les services de renseignement se concentrent sur la traque de matériaux explosifs », et signale au passage avoir « déjà présenté », six ans plus tôt, l’« idée d’utiliser un véhicule à projeter sur une foule de mécréants ».


Cet attentat qui touche aujourd'hui l'Espagne s'inscrit dans une longue liste qui frappe l'Europe depuis trois ans. L’Allemagne, la Belgique, le Royaume-Uni et surtout la France (attentats de janvier 2015, du 13-Novembre, de Nice, de Magnanville, de Saint-Étienne-du-Rouvray, des Champs-Elysées) étaient jusqu'ici la cible privilégiée des terroristes. Pourquoi l'Espagne est-elle aujourd'hui visée ?


Bien sûr, il y a la participation de chacun de ces pays à la coalition qui lutte contre l’État islamique sur le théâtre syro-irakien. Évidemment, il convient de ne pas oublier le symbole que ces pays représentent de l’opulence et de la luxure des mécréants - en l’espèce, les Ramblas barcelonais constituent, comme les Champs-Elysées parisiens, une cible de choix pour les intégristes. Mais il ne faut pas négliger le simple principe de réalité. Interrogé en juin dernier, un haut cadre de la lutte antiterroriste française mettait en garde : « Il ne faut jamais oublier que les terroristes frappent d’abord là où ils peuvent frapper. Il y a toujours une raison d’opportunité. »


En avril dernier, la police de Catalogne avait mené une opération antiterroriste en lien avec l'enquête sur les attentats de mars 2016 à Bruxelles. Neuf personnes avaient été arrêtées pour appartenance présumée à une organisation terroriste - des hommes entre 30 et 40 ans, un de nationalité espagnole et le reste de nationalité marocaine. L'opération, menée à Barcelone et ses alentours, visait « un présumé groupe jihadiste avec des connexions internationales », mais il n'y avait pas « d'indices clairs » de leur éventuelle intention de commettre un attentat en Espagne, avait alors indiqué le responsable de la sécurité au sein du gouvernement de Catalogne.


Jusqu’ici, l’Espagne servait surtout de base de transit pour les djihadistes ne souhaitant pas attirer l’attention des services de leurs propres pays. C’est ainsi que les complices et l’épouse d’Amedy Coulibaly prenaient la tangente pour la Syrie via Madrid avant que le terroriste ne tue une policière municipale à Montrouge et quatre personnes de confession juive à l’HyperCacher de Vincennes début 2015. Ayant déjà rejoint la Syrie, le vétéran d’Afghanistan Ahmed Laidouni comptait passer en Espagne en août 2014 pour mieux berner les services français afin de rejoindre l’Hexagone où il comptait recruter des volontaires pour le djihad. Et le terroriste marocain Ayoub El-Khazzani qui avait séjourné avec sa famille à Algésiras préférait cibler le Thalys entre Bruxelles et Paris supposé transporté des voyageurs américains plutôt que s’en prendre à son pays d’accueil. Cette doctrine est aujourd’hui caduque.

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