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ReportageAu Maroc, une semaine de chasse aux masques subventionnés

11.04.2020 à 18 H 08 • Mis à jour le 11.04.2020 à 18 H 10 • Temps de lecture : 5 minutes
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C’est une semaine folle qui s’est écoulée durant laquelle, en plein confinement, et alors que « l’aide de subsistance » commençait être distribuée, le gouvernement rendait obligatoire le port des masques de protection dont le prix est subventionné. Et pour cause, nombreux sont ceux qui n’arrivent toujours pas à trouver les bavettes promises, tandis que l’appareil répressif s’est déjà activé pour punir tous ceux qui mettent le nez dehors sans masque

Le lundi 6 avril, le Maroc par le biais des ministères de l'Intérieur, des Finances, du Commerce et de l'Industrie, rendait le port des masques obligatoire à l'extérieur des domiciles. La décision, selon le communiqué conjoint diffusé en soirée par ces différents services, annonçait que la décision allait être effective dès le lendemain, soit le 7 avril.


Dans la foulée, le gouvernement annonçait que plusieurs masques allaient être produits au Maroc et qu’ils seraient immédiatement distribués, pour un prix de 0,80 dirhams l’unité, grâce à une subvention, dont le montant n’a pas été révélé, du Fonds spécial dédié à la gestion de la pandémie du Covid-19.

 

C'est une étude qualitative et comparative réalisée par Abdelghani El Harfi, un professeur universitaire à la faculté des Sciences de Agadir, qui aurait vraisemblablement poussé le gouvernement à imposer le port du masque.


Relayée par Challenge et Médias24, l'étude, adressée au ministère de la Santé, propose simplement de comparer les données sur la pandémie du Coronavirus dans les pays de l'Asie orientale, de l'Europe occidentale de l'Amérique du nord et du Maroc.


L’étude, rapidement prise au sérieux, est cependant sujette à interrogations, notamment lorsqu’on sait que le chercheur en question est… géologue et plus connu pour son travail sur l’améthyste marocain, une variété de quartz violet. À Challenge, Abdelghani El Harfi explique que c’est le président de l’université Ibn Zohr de Agadir qui l’a renseigné sur le rôle qu’a pu jouer son étude dans la prise de décision gouvernementale. Les déclarations publiées n’ont pas été démenties par aucun représentant des autorités.


 Une production qui se compte en millions...

Intervenant sur Medi1TV, Moulay Hafid Elalamy, le ministre de l'Industrie, précisait que les bavettes en question ont déjà été produites depuis les 3 dernières semaines. Chapeautée par l’IMANOR, la production a été confiée à certaines usines qui devront respecter plusieurs normes d’hygiène.




Le ministre précisait par ailleurs que, dès le 7 avril, « 5,4 millions de masques ont été commercialisés. Nous avons commencé le lundi par les grandes surfaces. Mais après 1 heure 30, tout ce qui a été distribué a été vendu », avouait le ministre, imputant la faute aux consommateurs qui achètent en masse les masques.


Assurant que la production devrait atteindre les 5 million de masques, le ministre ajoutait qu’en deux jours, les services de distribution (Centrale Danone et Jaouda) ont atteint les 66 000 points de proximité. Elalamy concluait en appelant les Marocains à n’acheter les masques « qu’à 0,80 dirhams ».

 

Une distribution compliquée qui connait des perturbations

Parallèlement, l’annonce faite par le gouvernement sans aucune forme de sensibilisation dans un premier temps a rapidement poussé les Marocains à se ruer vers les pharmacies. « Je suis venu ici en chercher parce que l’épicier à côté de chez moi n’en a pas », raconte cet homme, la quarantaine venu acheter, dès le mardi, des masques « peu importe le prix ». Face à la pharmacie, devant un de nos journalistes, plusieurs clients ont fait part de leur mécontentement en raison du prix fixé à 5 dirhams.


Seul hic prêtant à confusion et rapidement provoquant des lynchages et accusations à l’égard des pharmaciens : ils ne disposent pas des masques subventionnés, mais plutôt d’autres, achetés de leurs propres moyens. La problématique a rapidement conduit le Conseil régional des pharmaciens du Sud à ordonner aux pharmacies de ne tout simplement plus vendre de masques.


Le jeudi, le ministère de l'Industrie annonçait la décision de vendre les masques de protection par paquets de 10. Objectif : éviter les ruptures de stock des grands paquets mais aussi la vente à l'unité dont les conditions ne respectent certainement pas les normes d'hygiène.


Face à cette situation, plusieurs personnes contactées par Le Desk font part de leur désarroi devant l’impossibilité de trouver des masques. « Ce mercredi, je suis passé par deux grandes surfaces et 3 épiceries, en plus d’un BIM. Aucun n’a le masque subventionné », témoigne ce père de famille habitant à Rabat. Un autre, de la même ville, rapporte qu’il a pu « en trouver dans une pharmacie à Hay Riad, au prix de 3 dirhams l’unité. J’ai aussitôt alerté mes amis et voisins pour qu’ils puissent aller en acheter ».


À Casablanca, au centre-ville mais aussi aux quartiers Mers-Sultan et Gauthier, nos journalistes ont constaté nulle présence des masques promis par les autorités. Pendant toute la semaine, nous nous sommes rendus aux mêmes lieux : une grande surface, un BIM et une épicerie du coin. La première assure avoir liquidé tout son stock livré en début de semaine, tandis que les deux autres confient que les livreurs de produits laitiers ne leur ont rien ramené. Exception faite de BIM qui, au bout de la 4ème journée, présente des masques en tissu, lavables et dont l’étiquette écrite en italien renseigne toutefois que les bavettes ont été produites au Maroc. Leur prix : 14 dirhams l’unité. (voir photos ci-dessous).



Médias24, après appel à témoignages fait état de difficultés à trouver des masques dans la métropole économique. Quant à Rabat et Salé, elles ne seraient pas mieux servies.


Dans une note affichée dans les épiceries de quartier à Casablanca (photo ci-dessous), Centrale Danone (en charge des distributions de masque, aux côtés de Jaouda et Dislog), annoncent le 8 avril, que depuis le début de l'opération, ses services ont distribué 2,5 millions de masques. «  Malgré cet effort, nous faisons face à une forte demande. Pour se déresponsabiliser de l'impossibilité de trouver les masques », explique-t-on pour renvoyer aux autorités, rappelant que ce sont elles qui décident de la quantité de bavettes à distribuer. Pour ce qui de la livraison, Centrale Danone précise que cela leur prend 24 heures pour les villes proches de leurs centres logistiques et 48 heures pour le plus lointaines. Seul message adressé aux citoyens : être patient pour les prochains jours.



De son côté, le Parquet n’aura pas attendu la distribution complète des masques subventionnés pour agir. Dans une dépêche de la MAP, on apprend que près de 174 procès-verbaux ont été mis à l'encontre de personnes pour non-respect du port obligatoire des masques. La même source ajoute que cette mesure s'inscrit « dans le cadre des efforts déployés pour lutter contre la propagation de l'épidémie du nouveau Coronavirus (COVID-19) »

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Par @soufianesbiti
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