Syndicats Rémunération des pharmaciens: la grève du 13 avril maintenue

Ce 6 avril, le ministre de la Santé Khalid Ait Taleb a reçu les pharmaciens, représentés par les différentes centrales syndicales. Lors de cette rencontre, les échanges ont notamment porté sur les marges bénéficiaires réalisées par les pharmacies sur la vente des médicaments.
Fin mars, une grève avait été annoncée pour cela, fixée au 13 avril prochain. En ligne de mire : une éventuelle réforme du décret relatif à la fixation des prix des médicaments, préconisée par la Cour des comptes. Les pharmaciens avaient par ailleurs pointé du doigt l'absence totale de concertation de la part des pouvoirs publics et le mutisme du gouvernement face à leur situation.
Rappelons que le rapport de la Cour des comptes sur les bénéfices des pharmaciens mentionne 57 % de marge bénéficiaire. Le chiffre avancé par la Cour des comptes porte à confusion. En effet, 57 % est la marge bénéficiaire du prix fabricant hors taxe qui inclut la marge des pharmaciens, distributeurs et TVA, nous explique-t-on.
La marge bénéficiaire brute moyenne d’un pharmacien sur la vente de médicaments est de 27 % et la marge bénéficiaire nette moyenne ne dépasse pas 8 %, avancent les syndicats régionaux. Le ministre a fait savoir que la marge de bénéfice du pharmacien d'officine est de 33,9 % du Prix public de vente (PPV) pour la première tranche, sachant que ce pourcentage diminue pour les autres tranches du prix du médicament.
Lors de cette réunion, « le ministre a essayé d’expliquer la marge mais a commis une erreur en parlant des 57 % avant de réctifier », nous fait savoir Mohamed Lahbabi, président de la confédération des syndicats des pharmaciens d'officine. Une erreur qui a suscité le mécontentement de nombre d'acteurs syndicaux présents lors de cette réunion.
Lahbabi nous explique que le pourcentage change en fonction de la tranche des prix du médicament. Pour les médicaments qui coûtent jusqu’à 199 dirhams (DH), la marge bénéficiaire est de 33,93 %. Celle-ci passe à 29,75 % pour les médicaments qui coûtent entre 200 et 588 DH. Une marge forfaitaire de 300 DH est fixée pour les médicaments qui coutent entre 589 et 2 000 DH, et une marge brute de 400 DH pour les médicaments qui coûtent plus que 2 000 DH. Lorsque l’on déduit les taxes, les charges et les salaires, la marge nette baisse à 8 %.
Par ailleurs, le ministre de la santé a expliqué que la comparaison avec les autres pays n’est pas tout à fait juste et équitable, précisant que le pharmacien dans les autres pays, contrairement au pharmacien marocain, bénéficie d’autres revenus supplémentaires hors la marge sur le médicament. Une déclaration qui conforte les pharmaciens dans leurs revendications, font savoir nos interlocuteurs syndicaux.
« Aujourd’hui il existe environ 3 000 pharmaciens qui vivent dans des conditions économiques difficiles au sein de ce secteur », a fait observer Ait Taleb, soulignant qu’une réforme est en train d’être menée pour accompagner le développement du secteur. S'agissant des prix des médicaments, le ministre a expliqué que « si le gouvernement parle aujourd’hui du prix des médicaments, ça ne concerne pas la marge de bénéfice », précisant que les composantes du prix du médicament sont multiples.
Les échanges entre les représentants des centrales syndicales du secteur de la pharmacie suite à leur annonce de grève nationale et le ministre de la Santé ont également porté sur la situation de crise que connaît le secteur, notamment le blocage de la tenue de nouvelles élections du Conseil de l’Ordre des pharmaciens. Dans ce sens, le ministre a déploré la non-tenue de ces élections depuis 2019 malgré les appels insistants sur l’importance d’organiser la profession.
La grève maintenue, d'autres réunions en vue
Cette rencontre a été l’occasion pour lever toute ambiguïté et préparer une feuille de route d'action commune, a souligné le ministre, laissant entendre que la grève nationale du 13 avril a été annulée et qu'il est question maintenant de se mettre d'accord sur les moyens d'améliorer les conditions de travail des pharmaciens.
Mohamed Lahbabi, nous affirme que la grève du 13 avril est maintenue. « On s'attendait à des signaux positifs de la part du ministère du moment que c'est lui qui nous a convoqué, mais il n'était pas question de cela », déplore-t-il. « On lui a toutefois demandé de faire un geste pour la profession, pour essayer de convaincre les syndicats régionaux d'annuler la grève de 48h qui aura lieu le 30 avril », explique le président de la confédération des syndicats des pharmaciens d'officine.
Pour sa part, le président du Syndicat national des pharmaciens du Maroc, Abderrazak Mounfaloti estime que la réunion du jeudi « était très positive et le ministre nous a assuré qu'on va travailler ensemble. La réunion d'hier est la première d'une série de réunions qui s'ouvrent avec le ministre ». « Le ministre sait bien que c’est 8 % », poursuit Mounfaloti soulignant que le ministre est averti de la faible marge bénéficiaire des pharmaciens et de la condition difficile de plusieurs professionnels de ce secteur, qui pour certains sont en faillite, précise-t-il
Par ailleurs, le syndicaliste a indiqué que les revendications des pharmaciens portées lors de cette réunion s’articulent autour de l’impératif de lutter contre la vente de médicaments hors officines et de passer par le circuit conventionnel, en l'occurrence le laboratoire, le distributeur puis le pharmacien.