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Cinéma

Sortie de film: La mer au loin, les âmes à nu

04.02.2025 à 09 H 53 • Mis à jour le 04.02.2025 à 09 H 53 • Temps de lecture : 3 minutes
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Avec La Mer au loin, Saïd Hamich Benlarbi signe un film émouvant et profondément humain dont la sortie en salles est prévue pour ce mercredi 5 février. Porté par une mise en scène subtile et une narration fluide, ce mélodrame explore la trajectoire d’un immigré clandestin, entre quête d’identité, rêves d’appartenance et poids du passé. Une histoire sublimée par le jeu tout en nuances et en profondeur d’Ayoub Gretaa qui a ému la Semaine de la Critique au dernier Festival de Cannes

Présenté en compétition officielle lors de la 21ᵉ édition du Festival international du film de Marrakech, La Mer au loin est une œuvre qui se distingue par la profondeur de son propos et l’élégance de sa structure cinématographique. Le réalisateur franco-marocain Saïd Hamich Benlarbi, déjà remarqué pour Retour à Bollène, poursuit son exploration des fractures identitaires et des trajectoires d’exil, mais cette fois-ci à travers une fresque romanesque empreinte de mélancolie.


La Mer au loin prend la forme d’une saga couvrant une décennie, de 1990 à 2000, où les fragments de vie de Nour interprété avec justesse par Ayoub Gretaa s’articulent autour d’intertitres délimitant des chapitres. Cette structure permet d’inscrire le récit dans une temporalité large, évoquant à la fois l’intime et le collectif. Nour, immigré clandestin à Marseille, navigue entre petits trafics, amitiés éphémères et amours impossibles. La rencontre avec Serge (Grégoire Colin), un policier imprévisible, et Noémie (Anna Mouglalis), sa femme énigmatique, marque un tournant décisif dans son parcours.


Pour ce faire, Saïd Hamich  adopte une approche quasi impressionniste, où chaque plan semble baigné dans une lumière douce et diffuse, renforçant l’idée de flottement propre à l’exil. Les mouvements de caméra sont aussi fluide qu'une douce mélodie, comme pour accompagner les errances de Nour, perdu entre deux mondes.


Le réalisateur joue habilement avec les ellipses temporelles, suggérant plus qu’il ne montre, et laissant au spectateur le soin de combler les silences. Les plans larges sur la mer, frontière naturelle entre les deux rives de l’existence de Nour, symbolisent à la fois l’éloignement et l’espoir. Cette dualité est omniprésente dans la mise en scène, qui oscille entre moments d’intimité poignante et éclats de vie collective.


Une fresque mélodramatique entre l’exil et l’amour


Si La Mer au loin peut parfois s’égarer dans un propos densifié par la richesse de son scénario, qui aurait peut-être gagné à plus de fluidité, le film marque par l’humanité de ses personnages et  l'importance de ses "maux". Nour n’est ni un héros, ni une victime, mais un être complexe, modelé par ses rencontres et ses choix, souvent contraints par les aléas de la vie. La perméabilité de son caractère, incarnée viscéralement par Ayoub Gretaa, en fait un protagoniste profondément attachant. Le duo Serge-Noémie, à la fois protecteur et destructeur, apporte une dimension romanesque intrigante.


Grégoire Colin et Anna Mouglalis livrent des performances tout en délicatesse , ajoutant au film une couche supplémentaire d’ambiguïté. Une ambiguïté enrichie par le raï, omniprésent dans la bande originale, qui transcende sa simple fonction musicale pour devenir un personnage à part entière. Vibrant d’amour, de nostalgie ou de révolte, il accompagne Nour dans ses joies et ses peines, rythmant son parcours et reflétant ses états d’âme. Cette musique, empreinte de mélancolie et de nostalgie, souligne la profondeur du film tout en lui insufflant une énergie vitale.


Loin de tomber dans les écueils du misérabilisme ou du paternalisme, La Mer au loin offre une vision complexe et réaliste de la condition immigrée. Les relations entre Français et immigrés y sont dépeintes sans clichés, dans toute leur ambivalence. Le film explore avec subtilité les tensions entre le rêve d’un ailleurs et la réalité souvent cruelle de l’exil.


Quand Nour revient finalement au pays, il est confronté à l’irréversibilité du temps. Ce qu’il a laissé derrière lui est perdu à jamais. Ce moment, empreint d’une douce amertume, incarne l’essence même du film : un constat sur l’inaccessibilité des idéaux face aux dures réalités de la vie. En somme, La Mer au loin éveille une émotion discrète au départ, mais les larmes finissent par nous rattraper, portées par la profondeur du récit sur l’identité et l’appartenance.. Une œuvre qui mérite d’être vue et revue, tant elle résonne avec les questionnements contemporains sur la migration et l’intégration. La Mer au loin certes, et pourtant l’émotion si proche…

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Le Desk Culture