
Qui est vraiment Said Boukannouf, « roi de l’alcool » déchu ?
« Mais ce n’est tout de même pas Pablo Escobar ! ». Un collaborateur de Said Boukannouf interrogé par Le Desk est catégorique : son patron n’a rien à se reprocher et est loin d’être celui qu’on présente aujourd’hui dans les médias, - ceux citant ostensiblement des sources policières -. L’homme est pourtant aujourd’hui derrière les barreaux, son audience devant le juge d’instruction devant avoir lieu le 24 septembre.
Said Boukannouf est-il vraiment le roi des boissons alcoolisées comme il est souvent dit et répété ? Des témoignages recueillis par Le Desk et des données chiffrées obtenues, il est sans conteste un acteur clé de la distribution et de la vente d’alcool au Maroc. Discret, méconnu du grand public, l'homme d'affaires est davantage dépeint aujourd'hui comme un « baron » et « un chef de bande » s'activant dans l'illégalité.
En quelques années, sur la base du travail de son père Mohamed Boukannouf, il a réussi à se hisser au sommet de son activité. D’où vient-il ? Comment a-t-il réussi ? Quels sont ses gros coups qui n’ont manifestement pas manqué de lui attirer des ennuis ? Éléments de réponse et éclaircissement sur la trajectoire d’un businessman dont on assiste aujourd’hui aux préludes de sa chute.
Il était une fois pendant le protectorat
Des récents portraits brièvement brossés de Said Boukannouf à l'aune de la fameuse Opération Bacchus, on prétend qu’il était dans une autre vie tour à tour transporteur ou encore simple colporteur de boissons alcoolisées qui, avec ruse et malice, a fini par détrôner ses patrons pour gérer, faire fructifier lui-même ses affaires, jusqu'à contrôler un vaste secteur en pleine expansion.
D'autres récits aux sources aussi incertaines le désignent comme un fugitif longtemps en cavale puis finalement appréhendé. La DGSN aurait donc mis la main sur le king du business de l’alcool de contrebande. Qu’en est-il vraiment ? La réalité des faits ne colle cependant pas à cette description dont on l'affuble à coups de superlatifs et d'amalgames.
Pour comprendre mieux la place qu’occupait Said avant son arrestation, il faut revenir à l’origine de la petite fortune familiale amassée par son père. Pour la famille Boukannouf, tout commence au temps du protectorat français. Son père, originaire de la région d’Essaouira, opère alors en tant que VRP chez des commerçants français établis à Casablanca. Leur entreprise, les Docks vinivoles marocains, avait pignon sur rue à Mers Sultan, quartier déjà réputé pour ses brasseries à l'ancienne et ses caves à vin. Dans la métropole coloniale encore bourgeonnante, nait son premier fils, Hassan, aujourd’hui à la retraite et ayant par le passé opéré dans le secteur du transport, apprend-on. Un profil qu’on a dû confondre avec celui de son frère, Said.
Au lendemain de l’indépendance, les Français partent. Et comme il était souvent de coutume dans ce milieu, les anciens propriétaires qui font leurs valises pour l'Hexagone n’hésitent pas à refiler des chèques de compensation à leurs plus fidèles employés marocains pour leur permettre de rebondir. Mohamed Boukannouf en faisait partie.

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